samedi 1 décembre 2012

un seul être vous manque et tout est dépeuplé... alors imaginez deux!

C'est un peu triste, ce soir, que j'écris ces quelques mots.
Voilà quelques mois... que dis-je - le temps passe - quelques années, que je me laisse aller à la blogosphère, ou encore sur les réseaux sociaux. Tout ce temps pour tenter de dépeindre ce qu'est mon métier, montrer que nous policiers, ne sommes pas si loin des citoyens que nous devons protéger  et que, d'ailleurs, nous sommes, avant toute chose.
Montrer que nous ne sommes qu'humains, finalement; professionnels, certes. Mais humains. De fait, avec des défauts. Et, j'ose espérer  quelques qualités. J'insiste, mais finalement, ni mieux, ni moins bien que d'autres. Pareils. La seule chose que nous avons, c'est une éspèce de procuration de l'Etat, d'agir en son nom, selon les textes que nos représentants ont voté.
Par ma présence, j'essaye, en quelque sorte, de dépeindre mon environnement d'une manière différente que ce peuvent en raconter les journalistes, en général les seuls ayant accès à une partie de ces données.

Et pour cause, rien n'est mieux dit que lorsqu'il l'est de l’intérieur, par celui qui vit l'évènement.
J'ai commencé par un blog, et j'ai continué via le microblogging "Twitter".
Plus le temps est passé, moins je me suis senti seul .Je me suis fait la remarque, il y a peu; j'étais le premier à critiquer magistrats, avocats et autres journalistes. Ils représentent désormais 70% des gens avec qui je suis en contact via ces réseaux sociaux; Oh, je n'en connais, IRL, comme l'on dit -comprenez In Real Life - que très peu. Ce n'est pas faute d'en avoir envie... Et, jour après jour, échange après échange, on apprend un peu à se connaitre .Tantôt au travers d'un sujet personnel, la plupart du temps au travers d'un fait divers que nous commentons, et parfois, par le biais des commentaires que nous faisons tous sur nos professions respectives.
Puisque, finalement, c'est là que se trouve l'échange, le vrai. parler de ce que l'on connait, des difficultés rencontrées. De l'autre coté, le twittos, qui, peut-être comme moi, avait quelques idées préconçues et qui, au fil des discussions, comprend les difficultés "d'en face".
Le ton est différent chaque jour; l'humour, la colère, l'ironie. chaque jour, et chaque interlocuteur sont différents. Question de caractère, aussi. Parfois même chamaillerie; et je ne suis pas le dernier.
Il y a quelques temps, j'aurai dit "c'est de leur faute...", pour ne parler, finalement que de manière corporatiste. Aujourd'hui, je dis "qu'est-ce qui a pu conduire..." ; oh, j'en arrive parfois à la même conclusion. Mais pas toujours.
Policiers, gendarmes, magistrats, avocats... faisons partie d'une chaîne extrêmement complexe.
Une société idéale voudrait que toute cette chaîne fonctionne à la perfection. que les rouages soient huilés, et que le tout soit à plein régime... constamment, tout le temps.  Mais nous sommes tous humains, avec, parfois nos erreurs, mais aussi nos difficultés respectives, qu'elles soient personnelles ou professionnelles.
Toutes ces petites raisons qui font qu'un jour ne ressemble jamais à un autre. Que l'on apprécie les bons jours comme l'on déteste les mauvais.

Bref, je m'étend.... je m’égare, même.

Mais je me sens enrichi, au contact de toutes ces connaissances, aussi, puisque j'apprend, au quotidien, ce qu'est leur vie, mais surtout quelles sont leurs contraintes et leurs difficultés. J'ose espérer que eux, derrière leur écran, ressentent, au moins un tout petit peu, la même chose.
Tout cela n'empêche pas les désaccords, qui peuvent parfois être profonds. Mais toujours respectueux.
Mais au moins, on essaye de se comprendre; bref, même si on ne se voie pas, on communique.

Pourtant, nous rencontrons une difficulté. Tous, autant que nous sommes, magistrats et policiers, relevant du pouvoir que nous délègue  chacun en ce qui nous concerne, l'Etat, devons nous imposer un devoir de réserve. Quelques lignes de recherche me font découvrir qu'en fait, ce devoir, nous est imposé depuis 1935, et qu'il est, en fait, issu de la jurisprudence. Bien que repris, pour ce qui me concerne, dans le Code de Déontologie de la Police Nationale, issu de l'article 11 du Décret du 18 Mars 1986, lui portant création.

Bref, nous devons donc faire attention à ce que nous disons, aux opinions exposées.

En 1986, Twitter n'existait pas; je ne parle même pas de l'an de grâce 1935.
En ces temps, n'existait pas, non plus, l'anonymat qui confère à celui qui parle, une sécurité, une distance, sans pour autant qu'il soit dans l'obligation de renier ce qu'il est, sa profession, information qu'il serait alors censé porter un peu comme une croix, un boulet... une honte, dont il ne faudrait parler à personne.

Twitter et les blogs permettent à tout un chacun de s'exprimer, tout en permettant de mettre en avant, ou du moins de ne pas le cacher, ce qu'il est, ce qu'il fait.
La seule condition nous nous imposons tous: Pas de noms, pas ou peu de précisions géographiques. De sorte à ne pas mettre à mal une affaire dont nous aurions connaissance, ainsi, et surtout, ses acteurs.

Et voilà qu'un journaliste (est-ce bien la bonne appellation?), qui avait du temps à perdre (c'est comme cela qu'il se décrit lui-même), vient remuer tout ça, pour faire le "buzz".Ce journaliste descend dans la fosse pour "dénoncer" deux professionnels évoquant leur quotidien. Non sans humour, d'ailleurs, et c'est même ce qui tend à rapprocher de telles fonctions du citoyen "lambda".
On reproche tellement souvent aux policiers, comme aux magistrats, d'être dans leur tour d'ivoire.
Imaginez un peu les horreurs auxquelles nous faisons face tous les jours. Vols, viols, meurtres, alcool, drogue... Mais sans l'humour, la dérision... ou serions-nous?
Que ferions-nous, sans mêler cette distance à ce quotidien finalement si tragique?

En voilà deux, donc, qui ont voulu en descendre, de cette tour, pour se mêler à  la foule. Plutôt que de dépeindre une situation glauque, ils ont pris un ton humoristique pour évoquer une affaire qui leur revenait. Encore une fois sans aucun détail permettant d'identifier la dite affaire.
Ce qui n'a, et j'insiste, à aucun moment remis en cause leur travail puisque chacun est donc resté à sa place, dans le rôle qui est le sien. Cette affaire s'étant, de fait, déroulée, comme toutes les autres, jour après jour, sur tout le territoire français, sans incident.

Voilà donc un homme qui pense qu'il serait interdit de penser. Ou du moins de dire ce qu'on pense, même anonymement, sur un ton autre que grave, limite depressif!
A quand la lobotomie qui nous empêche directement de penser?

Mais j'en veux encore plus à cet homme qui, en plus, s'est permis de livrer en pâture - il n'y a pas d'autres mots - les identité de ceux qui se voulaient anonymes.

Monsieur Dewitte, vous n'avez rien compris. Rien. Aujourd'hui, j'ai pu lire ce commentaire qui trouve là tout son sens: hier, les magistrats voulaient censurer la presse; désormais, c'est la presse qui censure les magistrats".
Votre article est juste contre-productif; A contre courant de la société.

Devant ces faits, j'ai pensé à m'auto-censurer, à me limiter, comme certains.. mais à y réfléchir  je n'ai rien à me reprocher. Je n'ai donc aucune raison de me cacher. J'assume ce que j'écris, en faisant attention, toujours, à ne pas nuire, ni à mon institution, ni, directement, à mon travail, et aux enquêtes auxquelles il m'est donné de participer. Bien au contraire, mon but est de défendre l'institution et le travail que je suis fier d'accomplir tous les jours.

Pour finir, amis lecteurs, je ne peux que vous conseiller cette lecture: rassurez-vous. Si vous avez tenu jusqu'ici, il vous sera bien plus facile de lire ces quelques lignes.



A deux twittos qui n'ont toujours fait que respecter la noble profession qui est la leur. 

12 commentaires:

  1. J'ai perdu mon joli texte de reponse

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  2. Je me suis lancé le défi de réecrire mon texte perdu

    La vérité, le doute et le hasard sont nos trois personnages de ce soir,
    La vérité est éblouie par le mensonge qui est devenu maître du clavardage l'a fait danser, l'a fait chanter...

    Le doute s'est amouraché de Mademoiselle Certitude, le doute sse fait tout petit quand il est en couple et s'interdit d'interrompre Mademoiselle Certitude.

    Quand au hasard, il est ici ou là et ce soir il m'a rejoint dans mon insomnie pour avoir cette chance de vous lire et de partir un instant dans ces grandes salles de bibliothèques où j'ai eu a lire des lettres et des rapports de militaires en campagne.

    La délation c'est le début de la division dans une même patrie c'est la création de l'ennemi dans son propre camp, l'autre devient le danger...

    la délation, c'est la destruction du lien social par la mise en place du bouc émissaire dans un groupe, une communauté etc..pour détruire la relation sociale et humaine...

    La délation n'est jamais l'oeuvre du hasard.

    Signé ; Meu nier,Tu dors

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  3. Merci pour le lien vers le blog de l'ornithorynque... magnifique article. Et moi qui ne suis pas de vos professions, je peux vous assurer que je suis très triste de ne plus nos deux twittos, parce qu'ils me faisaient réfléchir, ils m'interpellaient, et surtout, surtout ils me faisaient rire !

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  4. Yeah ! Merci pour eux et je ne peux qu'abonder dans ton sens.

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  5. twitter est beaucoup moins bien sans eux...

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  6. Je ne sais pas si M. Dewitte n'a rien compris, mais j'ai envie de dire qu'avec votre billet et votre conclusion "A deux twittos qui n'ont toujours fait que respecter la noble profession qui est la leur. ", je ne suis pas sûr que vous ayez tout compris non plus.

    Car enfin, il me semble que ce n'est pas tant de twitter qu'on reproche à ces deux respectables magistrats, mais de faire ce genre de tweets PENDANT UN PROCÈS en donnant l'air de ne pas vraiment suivre, voir de se moquer de ce qui s'y passe.

    Alors oui, ils ont le droit de s'exprimer, oui, ils ont le droit (ce devrait peut-être même un devoir !) de se défouler, non, le journaliste n'aurait pas dû livrer leurs noms en pâture, mais je trouve quand même que ce genre de tweets (publics) "je me marre en douce pendant un procès face aux vitimes et aux justiciables" ne donne pas une bonne image de la justice et n'est pas "respecter sa profession".

    Le billet de l'Ornithorynque est très bien, mais celui de Pascale Robert-Diard aussi : prdchroniques.blog.lemonde.fr/2012/11/30/peut-on-juger-et-tweeter-a-la-fois

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  7. Messieurs et mesdames les policiers et les magistrats, mesurez-vous la distance qui vous sépare de la population lambda qui vous perçoit souvent non pas comme le garant de la justice, mais comme des êtres arrogants, méprisants et surtout ne contribuant absolument pas à cette justice. Si vous êtes officier de PJ aux Antilles vous devez certainement comprendre ce que j'évoque.

    Lorsque mes parents étaient jeunes et que j'étais enfant, il nous apprenaient que la justice était bonne et que si il arrivait quoique ce soit, il fallait aller trouver un policier. Pour mes petits frères et soeurs on ne leur disait plus ça.

    Et mes frères ou mes enfants, qui sont en métropole eux ont peur de la police : la noirceur de leur peau n'y est sans doute pas étrangère.

    Et mes parents, modestes citoyens qui ont trîmés toute leur vie, n'ont expérimenté que l'injustice. La justice phantasmée, on ne la retrouve que dans les romans et même plus dans les films.

    Alors, quand un fouille merde désœuvré pointe du doigt le fait que des magistrats surchargés préfèrent twitter au cours d'un procès au sujet de ce procès lui-même, en dénigrant des témoins —en croisant l'heure du twitt et le rapport du greffier(e), on peut même déduire de qui il s'agit ...— je trouve que effectivement ces comportement sont choquants et celui qui me choque le plus n'est pas le petit journalistes mais les magistrats "respectables" ou qui voudraient être considérés comme tels.

    Et ce que je trouve le plus grave et le plus symptomatique, c'est l'esprit de corps qui s'est fait autour de ce non-événement.

    En systématiquement déplorant l'action de ce journaliste, en refusant d'entrer dans la polémique ou de reconnaître que ces propos pouvaient choquer ou blesser certains justiciables, vous en apparaissez comme solidaires. Solidaires, pas par attachement à la liberté de communiquer, mais solidaires par esprit de corps. Un proc qui utilise Dark Vador comme avatar ... C'est digne de "V comme Vendetta" ... En tout cas pour la population lambda c'est très clair.

    Mais ce qui selon moi est le plus choquant c'est de voir autant de policiers se ranger derrière ces magistrats et de n'en voir quasiment aucun prendre position en faveur de leurs collègues qui dénoncent les dérives du système comme le STIC ...

    Je connais certaines de vos difficultés, mais il faut que vous vous rendiez compte que aujourd'hui, les enfants et les honnêtes gens ont peur de la police de la justice. Il faut que vous réalisiez que l'abîme qui vous sépare de la population lambda s'agrandit chaque jour, et c'est ça que l'article d'un journaliste désœuvré révèle. Et c'est justement ça que vous faîtes semblant de ne pas voir.

    Et si vous êtes réellement de bonne foi, alors c'est qu'il est décidément trop tard ...

    Après ces propos généraux sur le ressenti de la population lambda, j'en arrive à l'auteur de ce billet, vous monsieur le policier, que je tiens à féliciter. j'ai déjà eu l'occasion de lire certains de vos billets et une fois de plus j'en ai apprécié la teneur. Et en ce qui concerne ce non-événement des twitts au tribunal, ce billet est l'un des rares équilibré et vrai: "oui, ils ont le droit (...) mais je trouve quand même que ce genre de tweets (publics) (...) ne donne pas une bonne image de la justice et n'est pas "respecter sa profession".

    Bravo, ce billet nous prouve qu'il reste de l'humanité, de la logique et de la conscience au sein de votre profession et de son système.

    Merci

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    1. Vous aussi, vous vous égarez ;)
      Dans des considérations bien plus générales sur la police et la justice... qui mériteraient d'autres débats...
      On peut discuter, sur "ils auraient dû, ou pas... " tout le monde à le droit d'avoir un avis. Le fait est que la parution de ce journaliste, et la révélation de leurs identités les prive désormais d'être anonymes parmi les anonymes.
      Et si cet article n'était pas paru, qui aurait fait le lien entre leurs euteurs, et le contenu? Rien ne le permettait!

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  8. @Anonyme (1 décembre 2012 12:34) :
    Attention à ne pas confondre le billet et les commentaires. Celui qui a dit oui, ils ont le droit (...) mais je trouve quand même que ce genre de tweets (publics) (...) ne donne pas une bonne image de la justice et n'est pas "respecter sa profession"., ce n'est pas le policier tenancier du présent blog, mais moi-même, Chicxulub, qui ne suis ni policier, ni magistrat, ni rien du tout en rapport avec la police, la justice, l'ordre public, etc, n'ai jamais eu maille à partir avec la police/justice non plus. ;)

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  9. Pas d'accord avec votre conclusion
    "A deux twittos qui n'ont toujours fait que respecter la noble profession qui est la leur."

    Car l'image de la justice en sort écornée.

    Comme dirait Fantômette en commentaire sur l'article de SudOuest

    "Et je trouve très intéressant de savoir que pendant qu'un procès important aux Assises a lieu, les magistrats s'amusent à se balancer des "dizaines de tweets railleurs". ....

    Quand on voit la solennité de l'endroit, les robes revêtues par ces individus et l'arrogance dont ils font preuve, parce que la Justice est censée être une institution sérieuse, çà me pose tout de même question.

    Je n'avais jusque là aucune confiance en la justice, et ce n'est pas ce genre d'histoire qui va me rassurer"

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    1. Oubli: l'article de SudOuest

      http://www.sudouest.fr/2012/11/30/fallait-il-divulguer-l-affaire-des-tweets-894535-7.php

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  10. Vous connaissez sûrement cette histoire et si vous voulez vous lâcher sur des journalistes, laissez vous aller sur tous ceux qui n'ONT PAS BALANCé le nom de ces dizaines de magistrats en bande organisée qui ont accordé 15 ans d’impunité à ce milliardaire, directeur de campagne de F. Mitterrand passé avec 30 Mf à travers le parquet de Paris, la direction des affaires criminelles et des grâces et la cour de justice, afin de préserver le rapprochement de deux journaux qu’on lit tous les jours, le juge d’instruction défendant les intérêts de l’un d’eux, et se présentant aux législatives pour le PS .

    Non-lieu d’anthologie - 8 lignes 3 erreurs grossières - devenu définitif grâce à un magistrat qui valide les comptes de campagnes 2012. A récupérer auprès de Sm Usm Commission des lois Assemblée et sénat.

    La république est sabotée.
    Politiques, magistrats, avocats, et journalistes , ils ont tous laissé faire.

    Alors au lieu de connaître le nom des magistrats qui tweetent, on aimerait plutôt connaître le nom des magistrats qui sabotent la république.

    La priorité, c'est le bon fonctionnement des institutions.
    Or ces gens sont toujours à la manoeuvre !!!!!!

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