jeudi 28 octobre 2010

Policiers = voleurs casseurs?


Depuis maintenant quelques jours, on assiste à une nouvelle vendetta. Enfin nouvelle, rien de moins sur.
Quoi qu'il en soit, désormais, nonobstant le fait qu'elle ne fait jamais ce qu'il faut quand il le faut, voilà que maintenant, elle passe de l'autre côté. Comment ? Quel côté ? Je m'explique.
Au milieu des tensions liées à la réforme des retraites, et des manifestations qui entourent les discussions parlementaires, voilà certains politiques et syndicalistes qui arrivent à bout d'arguments. Enfin, on pourrait le penser devant leur attitude.  Voilà que, devant la multiplication des incidents liés aux casseurs qui se mêlent aux manifestants, ils nous annoncent que, en fait, ces casseurs, ou du moins certains, ne seraient que des policiers.

Ces pseudo dirigeants nous expliquent leur théorie: ces policiers-casseurs seraient donc chargés d'envenimer une manifestation qui a tout de pacifique, pour en faire un gros "bordel", le tout pour les beaux yeux des journalistes, alors chargés de diffuser les images de violence. Avec, en bout de chaîne, le client du média qui, outré de ce qu'il voit, en arrive à se désolidariser des manifestations.
Là, je dis « chapeau bas ». Il fallait y penser!
Mais ce n'est pas fini.
Depuis trois jours, une autre information tourne sur l'ensemble des médias français: en l'espace de quelques semaines, trois journalistes se seraient fait voler leur ordinateur portable. Tous contenant des données sensibles relatives à leur enquête sur l'affaire « Woerth-Bettencourt ».
Le premier fait remonterait au début du mois d'octobre ; ce jour-là, un journaliste du site web « mediapart » se fait dérober du matériel informatique. Le 21 octobre, ce sont deux autres journalistes, du journal « Le Point » et « Le Monde » qui se font également voler du matériel.  Et, là, surprise, à demi-mot (voir un peu plus), les policiers seraient à nouveau à l'origine de ces vols !!!
Là, je n'ai que peu de mots devant cette grosse enquête. Un député en rajoute alors pour demander « qu'on détermine si les vols sont bel et bien liés et qui en sont le ou les auteurs ». Personellement, je ne doute pas que les enquêteurs en charge de ces vols aient attendu les instructions de ce parlementaire !
Comment peut-on imaginer que, désormais, des policiers puissent être à l'origine de ces basses œuvres. Mais peut-être suis-je naïf! Je vais alors citer l'un ou l'autre de mes collègues, en espérant qu'ils me pardonnent pour le droit d'auteur :
« il me vient un doute affreux
et si tous les sauvageons des cités et les casseurs n étaient que des policiers hors service qui s adonnent à un vice caché ou bien des policiers en service agissant sur ordre du ministère pour créer de l emploi
et si... tous les automobilistes en infraction étaient des policiers en civil agissant sur ordre
et si.... »
Au suivant de répondre :
« Et si on arrêtait tous de travailler pour vérifier que l'ordre public est bien maintenu et que la société fonctionne mieux sans notre présence !!! »
Et je vous passe des remarques suivantes.
Il est vraiment regrettable que de telles affirmations soient portées sur la place publique. De deux choses l'une :
  • les auteurs de ces allégations disposent de preuves, et c'est alors de leur devoir de les transmettre à la Police des Police ou quelque autre pouvoir ou contre pouvoir (à moins qu'ils ne soient désormais tous à la solde du gouvernement) qui existent en France; il me semble qu'il en existe suffisamment. Et à ce moment-là, qu'ils attendent les résultats d'enquête pour parler. Mais ils n'ont rien à faire sur les plateaux télé pour parler de cela. Il me semble qu'il y a d'autres chats à fouetter, en ce moment.
  • ces gens-là ne font que reprendre des rumeurs, font des interprétations d'images pour en tirer des conclusions. Et là, on appelle cela de la manipulation.
Ce qui est certain, c'est que les policiers, en plus de ne plus soutenus par qui que ce soit, sont maintenant, accusés d'être à l'origine des troubles à l'ordre public ! Le tout ayant pour effet d'amenuiser la confiance de tout un chacun vis-à-vis de sa police.
A quoi sert la Police? En tous les cas, pas aux règlements de comptes politiciens. Ca, c'est certain.


mardi 19 octobre 2010

Ça y est, c’est fait. Comme je le redoutai, la Cour de cassation, suivant les recommandations du parquet général, a déclaré, aujourd’hui, la garde à vue « à la française » non conforme au droit européen. Y compris pour ce qui relève de la criminalité organisée.

De fait, à compter du 1er juillet 2011, la présence de l’avocat au cours de la garde à vue devra être modifiée. Alors, un texte a déjà été élaboré au Ministère de la Justice, mais il devra être retoqué, puisqu’il n’avait pas changé le régime dérogatoire.  
Un pas de plus est franchi dans la défiance vis-à-vis des policiers et gendarmes. C’est dommage, mais c’est ainsi. Il va falloir faire avec.
Désormais, il va falloir que nos institutions s'organisent, et j'avoue craindre cette phase-là. Je ne suis pas sur que nous soyons prêts. Mais on verra bien.
Ci-dessous, l'arrêt concerné, tiré du site de la Cour de Cassation:
Arrêt n° 5699 du 19 octobre 2010 (10-82.902) - Cour de cassation - Chambre criminelle
Rejet
Communiqué relatif aux arrêts rendus le 19 octobre 2010 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation
Demandeur(s) : M. J... X...
Vu l’ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 31 mai 2010, prescrivant l’examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, dans une information suivie du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, M. X... a été placé en garde à vue, en exécution d'une commission rogatoire délivrée par le juge d'instruction ; qu'il a sollicité l'assistance d'un avocat mais que la garde à vue, d'une durée totale de soixante-cinq heures, a pris fin avant l'expiration du délai de soixante-douze heures à l'issue duquel il aurait pu bénéficier de cette assistance, conformément à l'article 63-4, 7e alinéa, du code de procédure pénale ; que, mis en examen, il a présenté une demande d'annulation des actes accomplis durant sa garde à vue et des actes subséquents, au motif qu'il avait été porté atteinte à son droit à un procès équitable au titre, notamment, de l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme en ce que, d'une part, il n'avait pu bénéficier de l'accès d'un avocat au dossier de la procédure et que, d'autre part, il n'avait pas reçu notification du droit de se taire ; que la chambre de l'instruction a rejeté sa requête ;
En cet état ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 6 § 1 et 6§ 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
“en ce que la chambre de l'instruction a rejeté la requête en nullité présentée par M. X... ;
“aux motifs que M. X... est recevable à invoquer devant la chambre de l'instruction l'application de la Convention européenne des droits de l'homme qui a une autorité supérieure à celle des lois conformément à l'article 55 de la Constitution ; que, sur le moyen tiré de divers arrêts de la Cour européenne tels que cités dans la requête, il est à rappeler qu'aux termes de l'article 46, alinéa 1er, de la Convention européenne des droits de l'homme, les hautes parties contractantes s'engagent à se conformer aux arrêts définitifs de la cour dans les litiges auxquels elles sont parties ; qu’en réponse à l'argumentation développée à titre principal, il y a lieu d'objecter que :
a) contrairement à l'affirmation du mémoire, il est parfaitement erroné de soutenir qu'il est de jurisprudence constante que les solutions dégagées par la Cour européenne ont vocation à s'appliquer à tous les Etats signataires ; que, si tel était le cas, le requérant n'aurait pas manqué de produire les décisions de nature à conforter sa démonstration ; qu’or tel n'est pas le cas ;
b) est dépourvu de tout fondement textuel l'argument tiré de la distinction entre l’exécution des arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l'homme qui s’applique seulement à l'Etat partie au litige et les solutions jurisprudentielles dégagées qui s'appliquent à l'égard de tous les Etats qui ont ratifié la Convention ;
qu’il est rappelé à cet égard qu'il appartient aux juridictions d'appliquer la loi, telle que définie par les textes applicables interprétés le cas échéant par la Cour de cassation dans les cas où les décisions de cette juridiction s'imposent aux juges du fond, non une philosophie dégagée d'une convention internationale ; qu’en conséquence, en application des principes généraux et de l'article 46, alinéa 1er, de la Convention européenne des droits de l'homme, le juge national n'est lié que par le seul texte de la Convention européenne ainsi que par les décisions de la Cour européenne ayant statué dans un litige auquel est partie l'Etat dont il dépend ; qu’en l'absence d'une décision de condamnation expresse de la France sur l'assistance concrète et effective d'un avocat dès la première heure de garde à vue par la Cour européenne des droits de l'homme, le moyen invoqué sera rejeté ; que sur le moyen tiré de l'article préliminaire du code de procédure pénale qui prévoit que toute personne poursuivie et suspectée a le droit d'être assistée d'un défenseur, les dispositions de la loi française prévoient, lors de la garde à vue, le droit, renouvelé à chaque prolongation, à l'assistance d'un avocat avec lequel le gardé à vue peut s'entretenir librement et confidentiellement pendant trente minutes, l'avocat pouvant formuler des observations écrites qui sont jointes à la procédure ; que cet avocat peut intervenir dès le début de la garde à vue ; que c'est, dès lors, dénaturer l'article préliminaire du code de procédure pénale que de l'interpréter comme imposant l'assistance d'un avocat dès le début de la mesure de garde à vue ; que quant au régime de la garde à vue pour des infractions particulières dont la nature impose une restriction à ce droit lequel n'est que différé, la requête soutient, d'une part, qu'aucun motif impérieux justifiant l'application de circonstances exceptionnelles n'est retenu, d'autre part, que c'est dans le cas où la garde à vue a pour motif la mise en cause dans un trafic de stupéfiants que l'assistance d'un avocat est primordiale du fait des lourdes condamnations pénales susceptibles d'être prononcées et que les chefs d'accusation dont a fait l'objet M. X... ne doivent pas avoir d'incidence sur le droit à l'assistance d'un avocat pendant la garde à vue ; que le droit français prévoit une intervention différée de l'avocat lorsque le gardé à vue est mis en cause pour certaines infractions d'une particulière gravité, ainsi les infractions à la législation sur les stupéfiants ; qu’est inopérant le moyen invoqué par le requérant, tiré de la décision Poitrimol c/ France rendu le 23 novembre 1993, d'une part, en la forme en l'absence de production aux débats de cette décision, d'autre part, quant au fond la question de l'assistance d'un avocat dès la première heure de garde à vue n'étant pas évoquée dans cette décision ; qu’en l'état de la jurisprudence actuelle de la Cour européenne des droits de l'homme, cette restriction n'apparaît pas contraire aux dispositions de l'article 6, alinéa 3, de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu’enfin, n'apparaît pas plus expédiente, pour une démonstration de la nullité des procès-verbaux de garde à vue, l'invocation de l'article 802 du code de procédure pénale lequel dispose qu'en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne ;
“1) alors qu’il résulte de la jurisprudence conventionnelle que toute personne gardée à vue a le droit à l’assistance effective d’un avocat dès son placement sous ce statut ; qu’en jugeant que l’article 63-4 du code de procédure pénale qui donne la possibilité au gardé à vue de s’entretenir avec un avocat ne saurait être regardé comme violant les dispositions conventionnelles, aux motifs, radicalement inopérants, de l’absence de condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, lorsque cet entretien ne permet pas à l’avocat d’avoir accès au dossier et de défendre utilement son client, la chambre de l'instruction a méconnu l’article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l’homme ;
“2) alors que toute personne gardée à vue bénéficie des garanties reconnues à la personne « accusée » au sens de l’article 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, dont le droit de se taire et de ne pas participer à sa propre incrimination ; qu’en jugeant que l’absence de notification de ce droit n’est pas contraire aux dispositions conventionnelles aux motifs, radicalement inopérants, de l’absence de condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des articles susvisés ;
“3) alors qu’enfin, l’article 64-3 du code de procédure pénale étant contraire au principe constitutionnel d’exercice des droits de la défense en ce qu’il ne permet ni l’assistance effective d’un avocat durant la garde à vue ni la notification du droit de se taire, il y a lieu de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; qu’à la suite de la déclaration d’inconstitutionnalité qui interviendra, l’arrêt attaqué se trouvera privé de base légale au regard des principes constitutionnels de l’exercice des droits de la défense et de la présomption d’innocence” ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que, par décision du 9 juillet 2010, la Cour de cassation a renvoyé au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. X..., à l'occasion du présent pourvoi et formulée dans les termes suivants :"les dispositions du code de procédure pénale, notamment les articles 62, 63, 63-4 et 64, dès lors qu'elles permettent d'entendre une personne en garde à vue sans l'assistance d'un avocat, et ne garantissent pas la notification du droit au silence, sont-elles contraires aux principes des droits de la défense et à la présomption d'innocence exprimés notamment par l'article 9 et à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ?" ;
Attendu que, par décision du 6 août 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré l'article 64 du code de procédure pénale conforme à la Constitution et a dit n'y avoir lieu à statuer sur les autres articles déférés renvoyant à la décision qu'il avait rendue sur ce point le 30 juillet 2010 ; que, par cette dernière décision, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les articles 62, 63, 63-1 et 77 du code de procédure pénale et les alinéas 1er à 6 de son article 63-4, avec prise d'effet le 1er juillet 2011 et dit n'y avoir lieu à statuer sur l'article 706-73 du code de procédure pénale et le septième alinéa de son article 63-4 ;
Qu'il s'en déduit que le grief est devenu sans objet ;
Sur le moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu que, pour rejeter la requête aux fins d'annulation d'actes de la procédure de M. X..., l'arrêt se borne à relever l'absence, dans la Convention européenne des droits de l'homme, de mention expresse portant obligation d'une assistance concrète et effective par un avocat de la personne gardée à vue dès la première heure de cette mesure et de notification d'un droit de se taire, et le défaut de condamnation expresse de la France par la Cour européenne des droits de l'homme pour ce motif ; que les juges ajoutent qu'en l'état de la jurisprudence de cette Cour, la disposition du droit français prévoyant une intervention différée de l'avocat lorsque le gardé à vue est mis en cause pour des infractions d'une certaine gravité, tels les crimes et délits de trafic de stupéfiants, n'est pas contraire à l'article 6 § 3 de la Convention susvisée ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte conventionnel susvisé, d'où il résulte que, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'espèce, et non à la seule nature du crime ou délit reproché, toute personne soupçonnée d'avoir commis une infraction doit, dès le début de la garde à vue, être informée de son droit de se taire et bénéficier, sauf renonciation non équivoque, de l’assistance d'un avocat ;
Attendu que, toutefois, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors que ces règles de procédure ne peuvent s'appliquer immédiatement à une garde à vue conduite dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de sa mise en oeuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la bonne administration de la justice ;
Que ces règles prendront effet lors de l'entrée en vigueur de la loi devant, conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, modifier le régime juridique de la garde à vue, ou, au plus tard, le 1er juillet 2011 ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi
Président : M. Louvel
Rapporteur : M. Straehli, conseiller
Avocat général : M. Raysséguier, premier avocat général
Avocat(s) : Me Spinosi

lundi 18 octobre 2010


J’ai eu l’occasion, aujourd’hui, de pouvoir assister à une partie du procès dit « Ferrara », qui se déroule actuellement au Tribunal de Grande Instance de Paris. Pour rappel, Antonio Ferrara et plusieurs présumés complices sont jugés pour avoir fait évader celui qu’ils surnomment « Nino » le 11 Mars 2003, de la Maison d’arrêt de Fresnes, où il était détenu.

Antonio Ferrara

Ce procès, devant la Cour d’Assise d’Appel, a démarré voilà six semaines. Et c’était aujourd’hui les réquisitions du parquet, représenté par Anne Vosgien et Francoise Mothes ont ainsi argumenté toute la journée pour soutenir l’accusation.
Pour Antonio Ferrara, ce n’était pas forcément le travail le plus difficile, dans la mesure où il lui était difficile de nier s’être évadé. Le jeu consistait, pour lui, comme Mesrine en son temps, de dénoncer ses conditions de détention. C’est bien là le seul argument qui peut tenir la route pour un évadé.
 
Pour Dominique Battini, difficile d’argumenter, également. En effet, lors de l’opération, il était sérieusement blessé, allant jusqu’à perdre un œil. Sur place, il laissait des traces de sang, permettant ainsi aux techniciens d’isoler son ADN.
 
Avec Karim Bouabas, ils forment le trio de ce que l’avocat général a appelé les cartes maitresses de ce puzzle. Le réel enjeu, pour ce trio, réside dans le fait que les jurés retiennent, ou non, la tentative d’assassinat à l’encontre des deux gardiens de prison qui étaient dans les miradors au moment des faits.
 
Pour rappel, le commando qui se présente devant la porte dite « chantier », utilise des explosifs, pour rentrer. Pour éviter la défense des miradors, des coups de feu à l’arme de guerre, son tirés, à environ 40 mètres (alors que ces armes peuvent tirer, de manière efficace, selon l’expert, jusqu’à 2 km). A l’intérieur, Antonio Ferrara, avec l’aide d’un gardien véreux (condamné en première instance), fait sauter la grille du quartier disciplinaire, dans lequel il se trouve depuis la veille, pour avoir refusé une fouille à l’issue d’un entretien avec son avocat (lequel est considéré comme le « top départ » de l’évasion).
 
Mais la majorité des observateurs étaient bel et bien présents pour entendre les réquisitions à l’encontre de Karim Achoui. L’avocat controversé avait été condamné, en première instance, à 7 ans d’emprisonnement. Et cette même peine a été requise aujourd’hui par l’avocat général, peine assortie d’une interdiction d’exercer à titre définitif.
 
Qu’est-ce qui a pu pousser l’avocat à franchir la ligne, s’est demandé Francoise Mothes ? Elle n’en avait pas la réponse, dans son réquisitoire, bien qu’elle a émis une idée ; d’ailleurs la seule qui vaille : l’argent. Ajoutez à cela ce que Achoui déclare lui-même dans son livre, lorsqu’il parle de son attirance vers le grand banditisme (qui serait d’ailleurs une des causes de l’éclatement de son cabinet, avec son ancien associé). Bref, un mélange du genre qu’il vaut mieux éviter : l’argent facile et le banditisme.
 
Je n’ai pas assisté au procès dans son intégralité, à l’exception d’une demi-journée, au début. Mais, de ce que j’ai pu entrevoir, et qui a été souligné par l’avocat général, une fois de plus, comme dans tous les procès en relation avec le grand banditisme, le principal angle d’attaque de la défense : le travail des policiers. D’un côté, les gentils, en l’occurrence des hommes qui ont déjà été condamnés, pour trafic de stupéfiants, braquage, évasion…. Et de l’autre, les méchants, les policiers, qui font mal leur travail, et s’acharnent contre les gentils !
 
Quand je vous dis que l’intérêt de l’avocat, c’est de faire sortir son client de prison, peu importe la vérité. Je vais reprendre les mots de Mme Mothes, lorsqu’elle parle des avocats de Karim Achoui : « ils ont essayé de faire éclater la vérité. Leur vérité ». Tout ça est assez loin de l’idée de justice telle qu’on peut la concevoir. Enfin, c’est mon avis.

Karim Achoui

jeudi 14 octobre 2010

Condamnation de la France par la CEDH


Ça y est, c'est tombé, aujourd'hui.
Tous les jours, nous nous rapprochons un peu plus de ce qui devient inéluctable. C'est évident au travers de ce blog, je suis contre la présence de l'avocat pendant les auditions, mais cela ne saurait tarder.
Cet arrêt devance de peu celui qui est attendu dans les prochains jours de la Cour de Cassation, alors même que Michèle Alliot-Marie présentait son projet de loi de réforme de la garde à vue pas plus tard qu'hier, en Conseil des Ministres.
Nous voilà donc pris dans un étau; le judiciaire et le législatif sont d'accord, même si la CEDH, et très certainement la Cour de Cassation, vont plus loin que le projet de loi. En effet, ce projet de loi institue la présence de l'avocat dans le cadre des crimes et délits dits de droit commun (où la garde à vue n'excède pas 24 ou 48 heures, en cas de prolongation). Dans ce que l'on appelle les régimes dérogatoires, le Garde des Sceaux a prévu de maintenir la présence de l'avocat à partir de la 72è heures de garde à vue. Il devra donc vraisemblablement revoir sa copie.
Quelles sont donc les incidences pour nos affaires?
Avant, il faut également préciser que ce projet de loi, tout comme la condamnation de la France, demandent à ce que soit rétabli ce que l'on nomme "le droit au silence". C'est à dire que toute personne placée en garde à vue peut ne pas vouloir s'expliquer de ce qui lui est reproché, et donc ne pas répondre aux questions des enquêteurs.
Ensuite, je dois de préciser une nouvelle chose; je fais bien la différence entre ceux que je qualifie de délinquants d'habitude (les voleurs multirécidivistes, trafiquants de drogue, etc...) et ceux qui se font attraper parce qu'au mariage du petit dernier, ils ont bu un verre de trop. Le second n'a fait de mal à personne (sauf en cas d'accident, bien-sur). Il n'a ni volé ni frappé personne.
Donc, ce délinquant va donc se retrouver en garde à vue. Et, à la moindre question, il nous dira "je n'ai rien à vous dire". Ce que lui aura soufflé son avocat qui sera là dès le début de la garde à vue. Bien sur, inutile d'insister et de perdre du temps. Les auditions seront donc finies avant même d'avoir commencées.
Je vous passe la confrontation entre une victime de viol et son auteur; ce dernier sera assisté d'un avocat et la victime sera seule. J'ose ésperer qu'aucun de mes collègues, en charge des dossiers de viol,  n'entreprendra une telle confrontation!
Donc, retour à nos auditions, le plus simple est encore de ne plus en faire. Les affaires seront faites au mieux, toujours, mais sans audition. C'est le Procureur qui sera donc chargé des auditions sur le fond. Là encore, j'éspère qu'au Parquet ils sont prêts, parce qu'ils vont avoir une quantité non négligeable de travail en plus!
Bien sur, les avocats ont donc obtenu ce qu'ils demandaient depuis des années. Leurs clients pourront donc être satisfaits. A l'inverse, les victimes, ainsi que la Justice n'a rien gagné. Mais ca, on s'en rendra compte dans quelque années.
Oh, bien sur, les statistiques, elles, vont aller dans le sens de la loi. Michèle Alliot-Marie a déjà quantifié le nombre de futures garde à vue. On devrait donc passer à 300.000 au lieu des 800.000 actuelles (attention à celui qui en fait une de trop!!!). Et je vous parie qu'on arrivera à ces chiffres, ou pas loin.
A coté de cela, les délinquants seront moins souvent en prison, et la délinquance se multipliera.
Pourquoi? C'est simple. En audition, le policier avait toujours la possibilité de mettre un voyou face à ses contradictions. En gros, face aux arguments du policier, il reconnaissait, au moins partiellement, sa participation aux faits reprochés. Maintenant, il ne dira plus rien au policier. S'il est déferré, il faudra attendre une audition auprès du magistrat; combien de temps d'attente? Je ne le sais pas, mais la justice n'ira pas plus vite. Et, entre temps, son avocat l'aura aider à se trouver une bonne excuse. Comme (et je l'ai déjà vu) un passeport qui, bizarrement, voit une de ses pages noircie d'un tampon provenant de je ne sais quel pays sous développé, où la falsification est monnaie courante. Tout ça, on le sait, on l'aura.
Tant pis pour nous. Tant pis pour la justice. Mais, comme le veut la tradition, les statistiques diront de toute façon que la réforme est bonne.